SEINE-EURE : VEOLIA EN TERRAIN CONQUIS.
Depuis plusieurs années, à Louviers et sur l’ensemble de l’agglomération, « l’association pour l’amélioration du cadre de vie et de l’environnement » se bat pour le retour en régie publique des services privatisés. Ces « délégations de service public» où le mot « public » ne sert qu’à camoufler un vrai détournement d’argent public au profit d’ opérateurs privés. Ainsi, l’enlèvement et traitement des ordures ménagères, transports, et plus particulièrement encore approvisionnement en eau et traitement des eaux usées. Nous sommes en effet sur un territoire où Véolia a su faire ce qu’il faut pour enserrer nombre d’élus dans ses mailles : pourquoi donc la fondation « Véolia environnement » a-t-elle contribué pour la somme de 20 000€ en 2011 à couvrir l’ardoise salée de la réfection du Marité, le trois-mâts fécampois qui sert de joujou au grand timonier local, le maire PRG du grand port de mer qu’a, comme personne ne l’ignore, toujours été la cité drapière ?
Autant dire que dès qu’on met la multinationale en cause, ça s’agite nerveusement. Ainsi jeudi, les délégué-e-s au conseil communautaires ont été invités, dans la précipitation, à prolonger le contrat liant Veolia et Seine-Eure jusqu’en 2017 et 2021. Pourquoi ne pas attendre les élections municipales de 2014 et laisser cette responsabilité aux nouveaux élus ? L’assemblée, qui devait de plus se prononcer ce soir là sur 60 dossiers, ne disposait pas de tous les éléments, loin s’en faut. Les militant-e-s de l’association (membres d’EELV, de la LDH, du NPA, du PG, du PCF, du PS…) relayés par deux élu-e-s EELV et un PS, ont plaidé pour le report de la décision, en présentant un argumentaire étayé (voir ci-dessous).
Finalement, comme on pouvait s’y attendre, la méconnaissance du dossier, la peur de l’inconnu
et celle de déplaire au maître l’ont emporté : sur 82 élu-e-s, 67 l’ont suivi, 6 ont voté contre et 9
se sont abstenu-e-s.
Une remarque en passant : le chef de file du Front de gauche, le maire PCF d’Alizay Gaëtan
Levitre, a fait une intervention très juste sur la nécessité de revenir en régie, de ne pas laisser
les multinationales disposer de l’eau comme d’une vulgaire marchandise, sur la nécessité
d’accorder la gratuité pour les 15 premiers m3… mais en s’abstenant, lui et ses camarades se
sont placés à côté de la question posée au lieu de renforcer le front autour des demandes d’une
association à laquelle participent pourtant des membres de son parti.
Autre remarque : le groupe EELV a jugé nécessaire d’appeler séparément et de distribuer son
propre matériel justement ce soir là. Bizarre…
L'eau et l'assainissement resteront donc dans les mains de Véolia pour bien des années
encore. L’association a décidé de saisir la CADA (commission d’accès aux documents
administratifs) pour que l’examen des pièces et des comptes soit réellement contradictoire.
LE DOCUMENT DiSTRIBUE AUX ELU- E- S (extraits)
L’association pour l’amélioration du cadre de vie et de l’environnement et le retour des DSP en
régie publique s’est adressée solennellement aux délégués de la Communauté d’agglomération
Seine-Eure. Malheureusement, seule une poignée d’élus a compris l’importance de
l’engagement pourtant voté à la majorité. Il eût été de bonne gestion de différer le vote d'une
délibération qui laisse l'eau et l'assainissement dans les mains de Véolia pour bien des années
encore.
Au rythme actuel il faudra 365 années pour amortir le premier versement de Véolia à la ville de
Louviers ! (droits d’entrée versés en 1989) !
925 années pour amortir le second !
158 années pour amortir l’usine des Hauts-Prés !
355 années pour amortir un des contrats passés avec Val-de-Reuil !
Cela ressort de l’examen de la gestion de Véolia dans le cadre de la convention liant l’opérateur
privé et la CASE. Un bilan aussi surprenant qu’exceptionnel puisque le directeur départemental
des finances publiques considère que la méthode de calcul du groupe privé ne correspond
aucunement à la réalité économique. Pourquoi ?
Nous ne sommes pas surpris de cette gestion abracadabrantesque. Le résultat, désolant, fait
que si la CASE appliquait l’arrêt Olivet en 2015, il lui faudrait théoriquement verser une
indemnité compensatoire de près de 9 millions d’euros à l’opérateur privé, au titre des
investissements non amortis par Véolia. C’est là le principal argument qu’utilise l’exécutif actuel
pour rejeter l’application de l’arrêt Olivet, refuser de mettre fin à la DSP (délégation de service
public) et d’engager le retour de l’eau en régie publique en 2015.
Tout cela est le fruit d’une stratégie savamment élaborée. Comme les responsables de la CASE
ne veulent pas revenir en régie, ils multiplient les obstacles et s’appuient sur des arguments très
discutables. Le principal consistant à faire peur aux délégués en majorant de manière
déraisonnable le préjudice éventuel d'une rupture de contrat en 2015.
Les délégués de la CASE ont en effet été invités à prolonger le contrat liant Veolia et
Seine-Eure jusqu’en 2017 et 2021. De quels éléments disposaient-ils pour juger du bien fondé
de cette demande ? L’avis consultatif du directeur départemental des Finances publique ne
suffisait pas puisqu’il n’était que consultatif. Ce dernier s’appuyait sur une synthèse élaborée par
un bureau d’études — Calia Conseil — que les responsables de la CASE refusent de rendre
public bien qu’aucun secret commercial ne soit nécessaire puisque l’opérateur ne change pas.
Nous avons décidé de saisir la CADA (commission d’accès aux documents administratifs) pour
que l’examen des pièces et des comptes soit réellement contradictoire.
Les élus ont voté pour la reconduction du contrat d’affermage, jeudi dernier.
Pourquoi ne pas attendre le renouvellement démocratique de 2014 pour confier aux futurs délégués le choix de la meilleure solution pour les usagers ?
Pourquoi ne pas attendre de posséder toutes les réponses aux questions légitimes que nous
posons ?
Pourquoi ces amortissements surréalistes ? Pourquoi cette précipitation à engager la poursuite
du contrat si longtemps ?
Pourquoi vouloir faire payer à tous les usagers de la CASE le remboursement de sommes
considérables dont seule la ville de Louviers et Val-de-Reuil ont bénéficié (plus de 3,5 millions
d’euros) ?
Pourquoi ignorer les ressources financières que procurerait le retour de l’eau en service public,
comme nous en avons maints témoignages ?
Pourquoi craindre une mise en concurrence en 2015 — même avec un autre opérateur privé —
pour respecter la lettre et l’esprit de l’arrêt du Conseil d’Etat ? Bien sûr la régie publique a notre
préférence mais l'intérêt des usagers commande tout.
Que se passera-t-il en 2021 ? Quel sera, alors, le montant de l’indemnité compensatoire due à
Véolia au rythme actuel des amortissements même si Véolia assure abandonner toute
demande de compensation. Ce ne sont pas des philanthropes, les 9 millions qu’ils
réclameraient pour rupture du contrat vont être payés quand, comment, sinon en augmentant le
prix de l’eau(…)