CONTRIBUTION D'UN CAMARADE PAYSAN SUR LE PROJET DE FERME-USINE DE HOULBEC COCHERLE
Nous publions ici à propos du projet de ferme-usine de Houlbec-Cocherel la contribution de notre camarade Thierry Martin, paysan de l'ouest du département:
"La première difficulté rencontrée à surmonter en ce début de lutte contre l'implantation de cet élevage intensif de bovin est celle de l'attitude des riverains qui s'inquiètent de leur tranquillité, à juste titre, et qui n'interviendraient pas forcément ailleurs, sur le même thème. Une forme d'égoïsme militant. Pas dans mon jardin.... La seconde est d'agglomérer à ce qui existe déjà, des participants qui élargissent la réflexion et structurent un peu plus le combat.
Sur le fond du dossier : Alors que la moyenne nationale des étables tourne autour de 60 à 70 vaches, avec une constante augmentation au fil des ans, on voit bien qu'avec 1000 bêtes on change d'échelle. On quitte l'exploitation familiale à capitaux familiaux pour investir un modèle de partenariat, de fonds extérieurs, profondément industriel sur la forme et capitaliste sur le fond.
Ces systèmes industriels hors normes nécessitent une automatisation forte, robots de traite, convoyeurs d'aliments automatiques, matériel XXL et génèrent une forte concentration locale d'effluents et de lisiers.
Contrairement à ce que nous pourrions croire, il n'est pas vraiment réalisé d'économie d'échelle et le coût de production reste élevé.
D'ordinaire, quand il y a cessation laitière pour cause de retraite, et qu'il n'existe pas de repreneur, l'exploitation est souvent reprise par un ou des voisins. Ce qui explique l'agrandissement continuel des étables, compte tenu de la pyramide des âges, actifs agricoles vieillissants, et que c'est le genre d'opportunité rare qui ne se produit souvent qu'une seule fois dans une carrière...Avec 1000 vaches, la rétrocession est rendu difficile par un prix de vente prohibitif, dissuasif pour une exploitation traditionnelle à taille humaine. Le risque c'est d'avoir un fonds de pension, une assurance, une banque ou un chinois quelconque qui se mette sur les rangs, ou un pool d'investisseurs qui font bosser des salariés et versent des dividendes aux actionnaire. Est-cela que nous voulons?
On a déjà vu, par ailleurs, dans le passé, de tels élevages laitiers dont le but n'était pas franchement de vendre du lait, la preuve, les acteurs acceptaient un prix de vente inférieur au marché. Mais l'objet final était la vente d'énergie par exemple. En mettant dans le digesteur d'une usine à méthane les effluents et déchets de culture, les propriétaires rentabilisaient leur installation, et quelquefois grâce à des subventions publiques au nom des l'écologie et d'énergie verte..
Au travers de cette histoire, je pense qu'il convient de réaffirmer notre attachement à une agriculture à taille humaine et à capitaux familiaux. Plutôt une bonne dizaine de fermes que cette monstruosité. Il y a une volonté des gouvernements successifs d'engager toujours plus loin l'agriculture française dans un scénario capitaliste, en contradiction avec l'emploi, l'écologie, la santé humaine. Il nous faut défendre l'inverse, revendiquer notre départ d'une agriculture productiviste, exportatrice, dépensière, pour retrouver ce qui nous est vital, un système équilibré, utile et non dangereux, sortir des accords scélérats genre CETA qui nous inféodent au marché libre et aux requins capitalistes."
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